Crises en route : surmonter les doutes pendant un pèlerinage ou pendant l’écriture

Le doute accompagne tout chemin de transformation. Qu’il s’agisse d’un pèlerinage sur le Chemin de Compostelle ou de l’écriture d’un roman initiatique, il surgit toujours à un moment : quand les jambes ne veulent plus avancer, quand les mots refusent de venir. En tant qu’écrivain voyageur, j’ai vécu ces deux épreuves, et j’ai compris que la marche et l’écriture partagent les mêmes obstacles… mais aussi les mêmes solutions.


Le doute du marcheur : Compostelle comme école de résilience

Chaque pèlerin commence son voyage avec enthousiasme. Les premiers jours sont portés par l’excitation de l’aventure, les paysages nouveaux, les rencontres inattendues. Puis arrive la première crise : les ampoules, la fatigue, le découragement. Le corps résiste, l’esprit s’interroge : pourquoi suis-je parti ? Quel sens cela a-t-il ?

Sur Compostelle, j’ai compris que ces moments de crise sont inévitables. Ils ne sont pas des accidents du chemin, mais une partie du chemin. Ils obligent à ralentir, à écouter son corps, à accepter ses limites. La marche devient alors une leçon de patience et d’humilité.


Le doute de l’auteur : la page blanche comme montagne intérieure

Écrire un livre n’est pas si différent. Le projet commence souvent avec passion : une idée forte, une scène inspirante, une envie brûlante de partager. Mais au bout de quelques chapitres, l’élan faiblit. Le texte semble perdre son sens, les personnages s’étiolent, la motivation s’effrite.

Le doute de l’auteur livre ressemble à une montagne intérieure. On se sent bloqué, incapable d’avancer. Comme le pèlerin qui hésite à repartir le matin, l’écrivain s’interroge : pourquoi écrire ? Est-ce que cela en vaut la peine ?

Paysage du Camino Francés en Espagne, photographié par Arnaud Lalanne, écrivain voyageur

Le parallèle entre marche et écriture

La marche et l’écriture se répondent. Dans les deux cas, on part avec un but, mais le chemin réel ne ressemble jamais au plan initial. Les imprévus surgissent : une pluie battante sur Compostelle, une critique intérieure qui ronge l’écrivain.

Dans les deux cas, il faut apprendre à avancer malgré le doute. Chaque pas, chaque mot, aussi petit soit-il, rapproche de l’objectif. On ne traverse pas un pèlerinage en courant, on le traverse un pas après l’autre. On n’écrit pas un roman d’un seul geste, mais ligne après ligne.

Arnaud Lalanne, écrivain voyageur

Transformer le doute en allié

Au lieu de craindre le doute, j’ai appris à l’accueillir. Il révèle nos fragilités, mais aussi nos forces. Le pèlerin qui surmonte une étape difficile gagne en confiance. L’auteur qui franchit un blocage d’écriture trouve une voix plus juste.

Le doute oblige à se recentrer : pourquoi marche-t-on ? Pourquoi écrit-on ? Ces questions ramènent à l’essentiel, elles évitent de s’égarer dans des objectifs secondaires. Le doute devient une boussole, un rappel du sens profond de l’aventure.


Stratégies pour avancer malgré la crise

  • Sur le chemin : accepter de ralentir, de faire une pause, de se délester de ce qui pèse trop lourd. Parfois, changer de rythme ou de perspective suffit à redonner de l’énergie.
  • Dans l’écriture : écrire même une seule phrase, noter une image, revenir à son carnet de voyage. Ne pas chercher la perfection, mais garder le mouvement.
  • Dans les deux cas : se rappeler que chaque crise est temporaire. Derrière la fatigue, il y a toujours une étape franchie, une lumière qui revient.

Quand la crise devient matière littéraire

Les moments de doute ne sont pas seulement des obstacles : ils nourrissent l’écriture. Dans Les Yeux bleus de la coquille Saint-Jacques, mon premier roman initiatique, les plus belles pages sont nées de mes propres faiblesses sur Compostelle : les jours de pluie, les doutes sur ma motivation, les moments de solitude extrême.

Un récit de voyage qui ignore les difficultés paraît artificiel. C’est dans la sincérité des épreuves que le lecteur trouve un écho à sa propre vie. La crise devient universelle : chacun y reconnaît ses propres combats.


L’aventure intérieure de la résilience

Surmonter un doute, c’est franchir une frontière invisible. Ce n’est pas seulement continuer à marcher ou écrire, c’est se transformer. La crise n’efface pas le chemin, elle en fait partie intégrante.

C’est ce qui fait de Compostelle et de l’écriture des aventures humaines et spirituelles. Elles nous rappellent que la vie n’est pas linéaire. Qu’elle est faite de pauses, de reculs, de pas hésitants. Mais que l’essentiel est de continuer, même à petit pas.

Arnaud Lalanne, écrivain voyageur

Conclusion

Un pèlerinage et un roman se ressemblent plus qu’on ne le croit. Tous deux exigent du courage, de la patience et une acceptation du doute. Les crises en route ne sont pas des échecs : elles sont les seuils qui permettent de grandir.
En tant qu’écrivain voyageur, j’ai appris à considérer le doute comme une partie du récit. Sur le Chemin de Compostelle comme dans l’écriture, il ne faut pas chercher à l’éviter, mais à l’habiter. Car c’est souvent là, dans l’incertitude et la fragilité, que naissent les plus belles pages et les transformations les plus profondes.

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